samedi 29 mars 2014

Mgr Lefebvre : mise au point sur le pape et sur la nouvelle messe

Lors de l’audience que Paul VI lui avait accordée le 11 septembre 1976, Mgr Lefebvre avait été stupéfait de constater à quel point il pouvait être calomnié auprès du pape, lequel affirmait qu’à Écône on faisait prêter un serment contre le Souverain Pontife. Le fondateur de la Fraternité se rendait compte que ses positions pouvaient être caricaturées auprès des autorités de l’Église par ceux qui, tant à l’extérieur des milieux traditionalistes qu’à l’intérieur, souhaitaient ajouter de la défiance à la méfiance afin d’hypothéquer à jamais une résolution de la crise. Les problèmes du Concile et de l’Après-Concile sont suffisamment sérieux pour qu’il n’y ait nul besoin d’ajouter des différends supplémentaires, comme la non-reconnaissance de la tête de l’Église ou l’invalidité du nouveau rite. C’est ce que Mgr Lefebvre déclara solennellement au pape Jean-Paul II le 8 mars 1980 :

Séminaire International Saint Pie X,
8 mars 1980

Très Saint Père,

Afin de mettre fin à des doutes qui se répandent actuellement soit à Rome, soit dans certains milieux traditionalistes d’Europe et même d’Amérique concernant mon attitude et ma pensée vis-à-vis du Pape, du Concile et de la Messe du Novus Ordo et, craignant que ces doutes ne parviennent jusqu’à Votre Sainteté, je me permets d’affirmer à nouveau ce que j’ai toujours exprimé :

1) Que je n’ai aucune hésitation sur la légitimité et la validité de Votre élection et qu’en conséquence je ne puis tolérer que l’on n’adresse pas à Dieu les prières prescrites par la Sainte Église pour Votre Sainteté. J’ai dû déjà sévir et continue de le faire vis-à-vis de quelques séminaristes et quelques prêtres qui se sont laissés influencer par quelques ecclésiastiques étrangers à la Fraternité.

2) Que je suis pleinement d’accord avec le jugement que Votre Sainteté a porté sur le Concile Vatican II, le 6 novembre 1978 à la réunion du Sacré Collège : « que le Concile doit être compris à la lumière de toute la Sainte Tradition et sur la base du magistère constant de la Sainte Église ».

3) Quant à la Messe du Novus Ordo, malgré toutes les réserves qu’on doit faire à son égard, je n’ai jamais affirmé qu’elle est de soi invalide ou hérétique.

Je rendrais grâce à Dieu et à Votre Sainteté si ces claires déclarations pouvaient hâter le libre usage de la Liturgie traditionnelle et la reconnaissance par l’Église de la Fraternité sacerdotale Saint Pie X ainsi que de tous ceux qui, souscrivant à ces déclarations, se sont efforcés de sauver l’Eglise en perpétuant sa Tradition.

Que Votre Sainteté daigne agréer mes sentiments de profond et filial respect en Jésus et Marie.

Marcel Lefebvre
ancien archevêque de Tulle

Sur ce que Mgr Lefebvre entendait par « comprendre le Concile à lumière de la Sainte Tradition », nous reportons le lecteur à cette explication qu’il donnait lui-même dans un entretien accordé à Pacte en 1987 :


« Que signifie « accepter le Concile selon la Tradition ? » Nous en avons parlé plusieurs fois, précisément avec le cardinal Ratzinger. Pour lui, cela veut dire que les thèses de Vatican II devraient être intégrées dans celles de la Tradition. Mais, intégrer, est un verbe encore vague. A mon avis, il convient de distinguer. Il y a quelques textes conciliaires, évidemment, conformes à la Tradition, qui ne posent aucun problème : je pense à Lumen Gentium, mais aussi à d’autres documents, tel celui sur la formation sacerdotale et sur les séminaires. Il y a ensuite des textes ambigus, qui peuvent cependant d’une certaine manière être correctement « interprétés » selon le Magistère précédent. Mais il y a aussi des textes franchement en contradiction avec la Tradition et qu’il n’est possible en aucune manière d’« intégrer » : la déclaration sur la liberté religieuse, le décret sur l'oecuménisme, celui sur la liturgie. Ici, l’accord devient impossible… »

mardi 25 mars 2014

Il y a 23 ans s'éteignait Mgr Marcel Lefebvre

« Je ne suis qu’un évêque de l’Église catholique qui continue à transmettre, à transmettre la doctrine. Tradidi quod et accepi. C’est ce que je pense que je souhaiterais qu’on mette sur ma tombe, et cela ne tardera sans doute pas qu’on mette sur ma tombe Tradidi quod et accepi – ce que dit saint Paul – « Je vous ai transmis ce que j’ai reçu », tout simplement. Je suis le facteur qui porte une lettre. Ce n’est pas moi qui l’ai faite cette lettre, ce message, cette parole de Dieu, c’est Dieu Lui-même, c’est Notre Seigneur Jésus Christ Lui-même, et nous vous avons transmis, par l’intermédiaire de ces chers prêtres qui sont ici présents, et par tous ceux qui, eux-mêmes, ont cru devoir résister à cette vague d’apostasie dans l’Église, en gardant la Foi de toujours et en la transmettant aux fidèles. Nous ne sommes que des porteurs de cette nouvelle, de cet évangile que Notre Seigneur Jésus Christ nous a donné et des moyens pour nous sanctifier : la Sainte Messe, la vraie Sainte Messe, les vrais sacrements, qui donnent vraiment la vie spirituelle. »

Mgr Marcel Lefebvre, sermon des sacres, Écône, 30 juin 1988

Film des funérailles de Mgr Lefebvre, le 2 avril 1991




mardi 18 mars 2014

Visite de Mgr Lefebvre au Gabon

Quelques mois avant sa mort, au mois de juin 1990, Mgr Marcel Lefebvre se rendit au Gabon sur ces terres qu'il avait jadis évangélisées de 1932 à 1945. C'était en quelque sorte ses adieux à l'Afrique qu'il avait tant servie et aimée. Après y avoir installé la Fraternité Saint-Pie X en 1986, il se rendit une dernière fois auprès des prêtres en place, les abbés Patrick Groche et Guillaume de Tanoüarn.



vendredi 14 mars 2014

Mgr Lefebvre : Doit-on aller à Rome ?

« Pour ma part, il m’a toujours semblé, en nous appuyant sur la sainte et fidèle Tradition de l’Église, que c’était mon devoir d’aller à Rome, de protester et de tout faire pour que le retour à la Tradition arrive un jour. Alors quelquefois certains membres de la Fraternité, hélas, ont estimé qu’il ne fallait plus aller à Rome, qu’il ne fallait plus avoir de contacts avec ceux, qui actuellement se dirigent vers l’erreur, qu’il fallait abandonner tous ceux qui ont adopté le concile Vatican II et ses conséquences, et par conséquent, puisque la Fraternité continuait à avoir des contacts avec Rome et avec le Pape, ils ont préféré quitter la Fraternité.

« Eh bien mes chers frères ça n’a jamais été ce que la Fraternité a fait, ni jamais l’exemple que j’ai cru devoir donner. Au contraire, je ne cesse d’aller à Rome, je continue d’aller à Rome et je continue d’avoir des contacts avec le cardinal Ratzinger, que vous connaissez bien, dans le but de faire revenir Rome à la Tradition.

« Si je considérais qu’il n’y a plus de pape, pourquoi aller à Rome ? Mais alors comment espérer faire revenir l’Église à sa sainte Tradition ?

« Car c’est le pape qui doit faire revenir l’Église à la Tradition, c’est lui qui a la responsabilité et si aujourd’hui hélas il se laisse entraîner dans ces erreurs de Vatican II, ce n’est pas une raison pour l’abandonner, bien au contraire ! Il faut faire tous nos efforts pour le faire réfléchir sur la gravité de la situation, le faire revenir à la Tradition et lui demander de faire revenir l’Église dans le chemin qu’elle a poursuivi pendant vingt siècles.

« Certains me diront sans doute, ceux qui nous quittent de cette manière : « C’est inutile, vous perdez votre temps ». C’est qu’ils n’ont pas confiance en Dieu ; Dieu peut tout. Humainement parlant c’est vrai, c’est décevant, mais le Bon Dieu peut tout et la prière peut tout obtenir. Et c’est pourquoi nous devons doublement prier pour le pape, pour que le bon Dieu l’éclaire, pour qu’il ouvre enfin les yeux, pour qu’il voit les désastres qui se répandent dans l’Église, pour qu’enfin les séminaires se remplissent à l’image des nôtres pour de nouveau faire des prêtres qui célèbrent la véritable messe et chantent la gloire du bon Dieu comme Notre Seigneur l’a fait sur la croix, et continuent le sacrifice de la croix. Voilà pourquoi je vais à Rome, voilà ce qu’est la Fraternité mes chers amis. »

Mgr Lefebvre, Zaitzkofen, sermon du 26 février 1983

lundi 3 mars 2014

Mgr Lefebvre et le cardinal Mermillod face aux dissensions françaises

Il n’y a pas loin de quarante ans, Mgr Marcel Lefebvre était le témoin du meilleur comme du pire de la part des fidèles de France. Sans doute sa patrie constituait-elle ce riche terreau qui a permis l’éclosion de nombreuses vocations, où des chapelles de fortune sont devenues des églises affermies, bastions de la catholicité. En même temps, elle était le théâtre de disputes stériles, où les parties, sombrant dans un volontarisme activiste, s’excommuniaient mutuellement. Le 18 septembre 1977, à l’occasion de ses trente ans d’épiscopat, il prêchait en ces termes :

« Vous entendez dire à droite, à gauche : le séminaire a pris une nouvelle orientation; le séminaire a ceci; le séminaire a cela. C’est le diable qui dit cela ! Parce qu'il veut détruire le séminaire. Évidemment, il ne peut pas supporter des prêtres catholiques; il ne peut pas supporter des prêtres qui ont la foi. Et hélas, il faut bien le dire, autour de nous et dans tous les pays, mais particulièrement en France, il y a de telles divisions parmi ceux qui veulent garder la foi catholique que fusent alors les calomnies, les médisances, les paroles exagérées, des réflexions insensées qui ne sont pas justifiées. Ne nous occupons pas de tout cela. Laissons parler. Agissons selon la volonté du Bon Dieu, selon la volonté de l'Église catholique, en continuant ce que nos prédécesseurs ont fait, ce que nos ancêtres ont fait, ce que le concile de Trente a demandé aux évêques et ce qu’ils ont fait : la formation qui a toujours été donnée aux prêtres et nous serons dans la sécurité d’être dans la vérité. C’est tout. Pas besoin d'écouter ce qui se dit de droite et de gauche. Demeurons dans la sécurité ; demeurons dans la foi. »
 
On s’en aperçoit, cette réalité ne date pas du XXIe siècle, ni même du XXe siècle. Cent ans plus tôt, le futur cardinal suisse Gaspard Mermillod avait déjà été frappé par cette propension qu’ont les Français à développer les chicanes. Le 9 mars 1852, il écrivait :

« Il y a le Paris catholique intellectuel, mais les chefs de ce mouvement sont divisés ; ils sont fractionnés en cercles, les cercles en coteries ; c’est le plus triste éparpillement de forces qu’il soit donné à l’homme de voir. Puis, au lieu de chercher à s’unir en face de l’ennemi, ces coteries dépensent leur temps à s’excommunier, leur poudre à se faire feu dessus. L’anarchie est complète, et nulle main, nulle raison assez forte pour rallier toutes ces puissances qui s’individualisent et s’affaiblissent. Il y a bien à la rigueur in necessariis unitas ; il y a trop in dubiis libertas ; il n’y a pas toujours in omnibus caritas ».