samedi 29 novembre 2014

Mgr Lefebvre naquit il y a 109 ans

« D'après tous les témoignages oraux et écrits que j'ai pu recueillir de ceux qui étaient au Séminaire français à cette époque, l'abbé Marcel Lefebvre ne prit jamais part aux discussions sur l'Action française. D'ailleurs jamais le Père Le Floch ne parla de Maurras dans ses conférences. La sainte théologie sur la royauté sociale de Notre Seigneur Jésus Christ et toute la doctrine sociale de l'Eglise se suffisaient bien à elles seules. Ajoutons que notre séminariste était plutôt effacé, doux, régulier.

« Au bout de quelques semaines de séminaires presque tous avaient un surnom, les Français restent les Français. Ainsi l’abbé Elchinger (1), c’était « le bel Artur », l’abbé Marcel Lefebvre c’était « l’Ange » du séminaire, car m’a dit un des anciens, « il s’imposait par sa piété, son esprit d’obéissance et son ardeur au travail ». Il fut sacristain, puis premier cérémoniaire sous la direction du célèbre père Heguy, une sommité en liturgie. Or, à Rome, au grand Séminaire français, la fonction de sacristain qui suppose l’autorisation de toucher les vases sacrés, ainsi que celle du cérémoniaire, n’étaient réservées qu’aux élèves modèles. »

« C’est à cette époque que se situe la prédiction mystérieuse faite par le pape Pie XI au futur archevêque. Un groupe de pèlerins s’était vu accorder la faveur d’une audience privée. Monsieur et Madame Lefebvre étaient du nombre, ainsi qu’un de leur fils, Monsieur l’abbé Marcel, alors sous-diacre. Les visiteurs se tenaient debout en demi-cercle dans la salle d’audience. Le pape en faisant lentement le tour, félicitant certains et les bénissant. L’abbé Marcel glissa un mot au maître de cérémonie : Pourriez-vous signaler à Sa Sainteté que je lui serais reconnaissant de bien vouloir bénir mes chers parents qui ont cinq enfants dans les ordres.

« Le Saint-Père de s’approcher alors et de poser les deux mains sur la tête du jeune abbé tout en disant à haute voix : « Vous avez bien mérité de l’Église ». Comment convient-il d’interpréter ces paroles ? Était-ce là un simple compliment formulé à l’adresse des parents, dans la direction desquels le regard du Saint-Père venait de se tourner ? Était-ce en même temps une prophétie secrètement destinée à la jeune tête qu’il venait de bénir ? C’était là un mystère que l’avenir éclairera peut-être. »

Père Jean-Jacques Marziac, Monseigneur Marcel Lefebvre, soleil levant ou couchant ?, NEL, 1979, pp. 81-82

vendredi 21 novembre 2014

Version sonore de la déclaration de Mgr Lefebvre du 21 novembre 1974

Mgr Lefebvre rédige cette déclaration dans la foulée de la visite de NN.SS. Onclin et Deschamps, envoyés de Rome, qui ont quitté le séminaire d'Ecône dix jours auparavant. Leurs propos, notamment sur les dogmes, avaient scandalisé le fondateur de la FSSPX et ses futurs prêtres.

lundi 10 novembre 2014

Mgr Lefebvre : Vivons davantage dans cette vertu d’espérance

« On néglige trop souvent la vertu d’espérance. Voyez, on parle de la foi, on parle de la charité. On néglige assez facilement la vertu d’espérance, c’est un tort parce que la vertu d’espérance est vraiment la vertu du pèlerin. Elle est la vertu de celui qui est en marche. Elle est la vertu de celui qui pense au but vers lequel il se dirige, vers lequel il marche. Or, cela devrait être tellement naturel, je dirais : Quelqu’un qui se met en voyage, il n’a d’autre idée, au cours de son voyage, que d’arriver au but qu’il s’est proposé d’atteindre. C’est évident, c’est clair. Sinon, quand on lui demande – Où est-ce que tu te diriges ? Où est-ce que tu vas ? – Eh bien, je ne sais pas, je n’y pense pas, je n’y ai pas pensé.

« Cela va de soi, si on demande à un voyageur où il va, il dira : - Je vais voir ceci, je vais voir cela, je vais rencontrer un tel. Il est tout le temps fixé sur le but vers lequel il va. Alors c’est un peu surprenant de ne pas suffisamment penser, réfléchir, méditer, sur le but vers lequel on se dirige. Ce serait tellement naturel d’y penser constamment parce que nous sommes toujours en chemin. Nous sommes in via, nous sommes des viateurs.

« Alors l’espérance, c’est vraiment la pensée du ciel. Là encore, le Saint-Sacrifice de la Messe nous met en contact avec le ciel. Notre-Seigneur nous ouvre les portes du ciel, et c’est l’éternité vers laquelle nous marchons. Il nous rapproche l’éternité, par sa croix. C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à parler souvent aux fidèles de leurs fins dernières, du ciel, de la Trinité Sainte, de l’état des âmes au ciel, des élus, des anges, de la Vierge Marie présente au ciel, de tous les saints, de la communion des saints dans le ciel. Parler aussi de notre ange gardien qui, lui, voit le ciel, comme dit Notre-Seigneur : - Il ne faut pas scandaliser ces enfants dont les anges voient Dieu. Donc notre ange gardien, lui, voit Dieu. Il n’espère pas seulement, il y est, lui. Alors demandons-lui de nous aider à penser au ciel et à vivre davantage dans cette vertu d’espérance. »

Ecône, conférence aux futurs diacres, 1er juin 1990



samedi 1 novembre 2014

Mgr Lefebvre : Un enfermement psychologique ne doit pas rendre impossible le retour à la normale

« Comment envisager le retour à une situation normale ? » s’interrogeait Mgr Lefebvre devant les séminaristes. Certes, il y a les conditions juridiques, reconnaissait-il. Mais elles ne dépendent pas vraiment de nous. En revanche, les conditions psychologiques sont de notre fait. Le repli sur nous-mêmes, l'outrance ou même la désinvolture à l'égard de la hiérarchie peuvent malheureusement nous rendre incapables d’amorcer un jour un retour à la normale. Le problème est toujours d’actualité puisque devant le scandale, nous sommes tentés d’user de jugements emportés, dialectiques et lourds de conséquences à l’égard de la hiérarchie de l’Église, et notamment du pontife romain. Voici ce que Mgr Lefebvre disait le 22 mars 1977 devant les séminaristes d'Écône :

« Comment envisager le retour à une situation normale ?  Evidemment il faudrait être prophète pour savoir répondre à cette question. Les circonstances peuvent être différentes, je ne sais pas. Mais en tout cas, nous devons faire tout ce que nous pouvons pour éviter ce qui pourrait rendre, je dirais, le retour à la normale difficile.

« Ce retour à la normale difficile est plutôt dans des conditions psychologiques plus que dans des conditions juridiques, parce que dans des conditions juridiques, qui est sorti de la normale ? Qui n’est plus dans l’état normal ? Qui s’est mis dans l’état hors la loi, d’une certaine manière ? Pas nous. On nous met hors la loi. Mais ce sont ceux qui se sont mis hors la loi qui nous mettent hors la loi. Ce sont eux-mêmes qui ont choisi ce chemin-là. Ils ont choisi pratiquement des nouveautés, un chemin qui les écarte pratiquement de la Tradition et qui les met dans une situation pratiquement schismatique, ou enfin à peu près schismatique, allant toujours davantage en s’éloignant de ce que toute la Tradition nous a enseigné. Nous, au contraire, nous continuons dans la ligne de la Tradition. Nous recueillons l’héritage qui s’est passé de siècle en siècle, nous essayons de le conserver le mieux possible, et c’est nous qui sommes pénalisés alors que ceux qui ne gardent pas l’héritage, qui l’abandonnent, qui le dissipent, sont ceux qui nous pénalisent.

« Alors nous devons garder fermement la ligne que nous suivons, ne pas en changer, mais pour ne pas, je dirais, rendre psychologiquement la situation plus difficile parce que, même s’il advient, et c’est ce qu’il faut espérer, qu’un pape futur revienne dans le sillage que nous prenons actuellement, le sillage de la Tradition, eh bien il faudra quand même qu’il ne nous rejette pas non plus, lui qui prendra l’héritage, en disant :

« - Vous avez eu une attitude telle vis-à-vis de ceux qui nous ont précédés, même s’ils n’étaient pas dans la bonne voie, qu’il nous est impossible de vous agréer de nouveau.

« Voyez, c’est pourquoi, personnellement, je n’ai jamais cherché la rupture, comme me le demandait l’abbé de Nantes : - Il faut qu’il y ait un évêque qui rompe avec Rome. Et puis ensuite, au-dessous, il parlait de moi. C’était clair, c’était moi qu’il visait. Moi je ne cherche pas la rupture avec Rome. Même avec ceux qui ne suivent pas la bonne voie, je ne cherche pas la rupture parce que je veux garder cette atmosphère psychologique, encore une fois, qui permette des relations plus faciles. Je ne pense pas qu’on pourra jamais m’accuser, ni accuser la Fraternité, d’avoir eu une attitude insolente, je dirais vraiment odieuse vis-à-vis du Saint-Père. Je ne pense pas avoir eu, ni sous ma plume, ni sur mes lèvres, une seule parole de mépris ou vraiment insultante pour le Saint-Père. Jamais ! Au contraire, je cherche toujours à respecter la personne, tout en étant très ferme pour les idées, en refusant absolument les idées et les choses qui nous sont demandées et qui ne sont pas conformes à la Tradition, de telle manière que le jour où les autorités ecclésiastiques changent, les relations puissent être reprises de manière normale et facile. »


dimanche 26 octobre 2014

Mgr Lefebvre : Le Christ doit régner

« N’oublions jamais que sans la grâce nous ne sommes pas capables d’agir d’une manière parfaite et sainte nous ne garderons même pas longtemps l’honnêteté naturelle, parce que le péché originel a mis le désordre dans notre nature. Alors si l’on dit que Notre Seigneur n’a pas besoin de régner dans la société, les hommes seront laissés à eux-mêmes et ils tomberont doucement dans les mauvaises habitudes, dans le péché. C’est pourquoi la grâce est nécessaire pour qu’une société soit vraiment chrétienne.

« Bien sûr tout ne se détruit pas du jour au lendemain. Après la Révolution, la société n’est pas aussitôt retombée à l’état sauvage. Beaucoup de gens étaient encore chrétiens et il est donc resté encore longtemps une certaine honnêteté on vivait, on circulait sans crainte d’être assassiné, l’immoralité n’avait pas tout envahi. Puis vint la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Est-ce à dire que, puisqu’il y avait des gens honnêtes, même sans culte officiel rendu à Notre Seigneur, l’on pouvait se passer de ce culte et rester honnête ? Eh bien, au bout d’un certain temps, on a commencé à s’apercevoir que le ver était dans le fruit et que tout se gâtait. Et nous assistons presque aux ultimes conséquences de cette absence de religion chrétienne dans les écoles, les universités, l’Etat; la société est toute corrompue : divorces, ménages détruits, enfants livrés à eux-mêmes. Ce sont là les conséquences du naturalisme, du rejet de la royauté de Notre Seigneur.

« Un jour à Mexico, les journalistes me demandaient : “Comment voyez-vous le progrès de la société ? Comment envisagez-vous l’évolution de la société moderne pour aller vers plus de justice, vers une meilleure répartition des biens ?”.

« J’ai répondu : il n’y a pas trente-six systèmes, il y a le règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ tant qu’il ne sera pas rétabli, tant que la loi de Notre Seigneur ne sera pas observée, tant que Sa grâce ne pénétrera pas dans les âmes, il sera inutile de chercher à obtenir la justice, la paix, et même à recréer des sociétés normales. Seule la grâce, qui régénère les âmes, engendre la vertu vraie elle fait des hommes des fils de Dieu et avec la charité leur infuse les vertus sociales, sans lesquelles ne se développe que l’envie. C’est facile à constater : aujourd’hui on excite l’envie, on pousse toujours plus les gens à revendiquer des droits. Moi, j’ai le droit d’avoir autant que mon voisin... On excite les hommes les uns contre les autres ; tous doivent obtenir la même chose ! Or l’envie crée la haine, et la haine engendre les dissensions civiles ; c’est la révolution dans les sociétés, les gens s’entre-dévorent.


« Si au contraire, les âmes sont transformées en Notre Seigneur, ceux qui exercent des responsabilités dans l’Etat, ceux qui ont la richesse, des biens, des terres, se montreront plus justes ils seront animés par la vertu de justice, ils comprendront qu’ils ont des devoirs à l’égard de leurs subordonnés. Et ces derniers comprendront qu’ils doivent travailler, accepter leur situation, car nous ne sommes pas sur terre uniquement pour faire fortune ils sauront que la vie surnaturelle vaut beaucoup plus que les biens d’ici-bas. »

Mgr Lefebvre, extraits de C'est moi l'accusé qui devrais vous juger


mardi 21 octobre 2014

Paul VI, pape libéral

« Dans ses Mémoires, publiés par un membre de sa famille, le Cardinal [Daniélou] dit explicitement : « II est évident que Paul VI est un pape libéral ».

« Et c’est la solution qui apparaît la plus vraisemblable historiquement : parce que ce pape-là est comme un fruit du libéralisme, toute sa vie a été imprégnée par l’influence des hommes qui l’entouraient ou qu’il a pris pour maîtres et qui étaient des libéraux.

« Il ne s’est pas caché de ses sympathies libérales : au Concile, les hommes qu’il nomma modérateurs à la place des présidents nommés par Jean XXIII, ces quatre modérateurs furent, avec le cardinal Agagianian, cardinal de Curie sans personnalité, les cardinaux Lercaro, Suenens et Dopfner, tous trois libéraux et ses amis. Les présidents furent relégués en arrière, à la table d’honneur, et ce furent ces trois modérateurs qui dirigèrent les débats du Concile. De même Paul VI soutint pendant tout le Concile la faction libérale qui s’opposait à la tradition de l’Eglise. Cela est connu. Paul VI a répété - je vous l’ai cité - les paroles de Lamennais, textuellement, à la fin du Concile : « l’Eglise ne demande que la liberté » ; doctrine condamnée par Grégoire XVI et Pie IX !

« On ne peut nier que Paul VI n’ait été très fortement marqué par le libéralisme. Cela explique l’évolution historique vécue par l’Eglise en ces dernières décades, et cela caractérise très bien le comportement personnel de Paul VI. Le libéral, vous ai-je dit, est un homme qui vit perpétuellement dans la contradiction : il affirme les principes, mais fait le contraire, il est perpétuellement dans l’incohérence. […]

« Le 7 mars 1965, il déclarait aux fidèles massés sur la place Saint-Pierre :

« C’est un sacrifice que l’Eglise accomplit en renonçant au latin, langue sacrée, belle, expressive, élégante. Elle a sacrifié des siècles de tradition et d’unité de la langue pour une aspiration toujours plus grande à l’universalité ».

« Et le 4 mai 1967, ce « sacrifice » était accompli, par l’Instruction Tres abhinc annos qui établissait l’usage de la langue vulgaire pour la récitation, à voix haute, du Canon de la messe. Ce « sacrifice », dans l’esprit de Paul VI, semble avoir été définitif. Il s’en expliqua de nouveau, le 26 novembre 1969, en présentant le nouveau rite de la messe :

« Ce n’est plus le latin, mais la langue courante, qui sera la langue principale de la messe. Pour quiconque connaît la beauté, la puissance du latin, son aptitude à exprimer les choses sacrées, ce sera certainement un grand sacrifice de le voir remplacé par la langue courante. Nous perdons la langue des siècles chrétiens, nous devenons comme des intrus et des profanes dans le domaine littéraire de l’expression sacrée. Nous perdons ainsi en grande partie cette admirable et incomparable richesse artistique et spirituelle qu’est le chant grégorien. Nous avons, certes, raison d’en éprouver des regrets et presque du désarroi ».

« Tout devrait donc dissuader Paul VI d’opérer ce « sacrifice »  et le persuader de garder le latin. Mais non ; se complaisant dans son « désarroi » d’une façon singulièrement masochiste, il va agir au rebours des principes qu’il vient d’énumérer, et décréter le « sacrifice » au nom de la compréhension de la prière », argument spécieux qui ne fut que le prétexte des modernistes :

« Jamais le latin liturgique ne fut un obstacle à la conversion des infidèles ou à leur éducation chrétienne, bien au contraire, les peuples simples d’Afrique et d’Asie aiment le chant grégorien et cette langue une et sacrée, signe de leur appartenance à la catholicité. Et l’expérience prouve que là où le latin ne fut pas imposé par les missionnaires de l’Eglise latine, là des germes des schismes futurs furent déposés. - Paul VI prononce alors la sentence contradictoire :

« La réponse semble banale et prosaïque, dit-il, mais elle est bonne, parce que humaine et apostolique. La compréhension de la prière est plus précieuse que les vétustés vêtements de soie dont elle s’est royalement parée. Plus précieuse est la participation du peuple, de ce peuple d’aujourd’hui qui veut qu’on lui parle clairement, d’une façon intelligible qu’il puisse traduire dans son langage profane. Si la noble langue latine nous coupait des enfants, des jeunes, du monde du travail et des affaires, si elle était un écran opaque au lieu d’être un cristal transparent, ferions-nous un bon calcul, nous autres pêcheurs d’âmes, en lui conservant l’exclusivité dans le langage de la prière et de la religion ? »

« Quelle confusion mentale, hélas ! - Qui m’empêche de prier dans ma langue ? Mais la prière liturgique n’est pas une prière privée, c’est la prière de toute l’Eglise. De plus, autre confusion lamentable, la liturgie n’est pas un enseignement adressé au peuple, mais le culte adressé par le peuple chrétien à Dieu. Une chose est le catéchisme, autre chose la liturgie ! Il ne s’agit pas, pour le peuple assemblé à l’Eglise, « qu’on lui parle clairement », mais que ce peuple puisse louer Dieu de la manière la plus belle, la plus sacrée, la plus solennelle qui soit ! « Prier Dieu sur de la beauté », telle était la maxime liturgique de saint Pie X. Comme il avait raison !

« Vous voyez, le libéral est un esprit paradoxal et confus, angoissé et contradictoire. Tel fut bien Paul VI. M. Louis Salleron l’explique fort bien, quand il décrit le visage physique de Paul VI : il dit « il a le visage double ». Il ne parle pas de duplicité, car ce terme exprime une intention perverse de tromper qui n’était pas présente chez Paul VI. Non, c’est un personnage double, dont le visage contrasté exprime la dualité : tantôt traditionnel en paroles, tantôt moderniste dans ses actes ; tantôt catholique dans ses prémisses, ses principes, et tantôt progressiste dans ses conclusions, ne condamnant pas ce qu’il devrait condamner et condamnant ce qu’il devrait conserver !

« Or, par cette faiblesse psychologique, ce pape a offert une occasion rêvée, une possibilité considérable aux ennemis de l’Eglise de se servir de lui : tout en gardant un visage (ou une moitié de visage, comme on voudra) catholique, il n’a pas hésité à contredire la tradition, il s’est montré favorable au changement, baptisé mutation et progrès, et est allé ainsi dans le sens de tous les ennemis de l’Eglise, qui l’ont encouragé. N’a-t-on pas vu un jour, dans les années 76, les Izvestia, organe du parti communiste soviétique, réclamer de Paul VI, au nom de Vatican II, ma condamnation et celle d’Ecône ? De même, le journal communiste italien L’Unita exprima une semblable requête y réservant toute une page, lors du sermon que je prononçais à Lille le 29 août 1976, furieux qu’il était de mes attaques contre le communisme ! « Prenez conscience, était-il écrit à l’adresse de Paul VI, prenez conscience du danger que représente Lefebvre, et continuez le magnifique mouvement d’approche commencé avec l’œcuménisme de Vatican II. » C’est un peu gênant d’avoir des amis comme ceux-là, ne trouvez-vous pas ? Triste illustration d’une règle que nous avons déjà relevée : le libéralisme mène du compromis à la trahison. »


Mgr Lefebvre, Ils l’ont découronné, Clovis, 2009, pp. 254-259

lundi 13 octobre 2014

Un avis de Mgr Marcel Lefebvre sur Mgr Walter Kasper

Mgr Lefebvre a connu celui qui allait devenir le cardinal Kasper. Nommé par Jean-Paul II, ce dernier était déjà « l’homme à penser du Synode de 1985 ». Il semble qu’il soit également celui de 2014. Déjà, il y a vingt-cinq ans, le fondateur de la Fraternité Saint-Pie X mettait en garde contre la dangerosité de la pensée du personnage. 
NN.SS. Lehmann et Kasper
« Le pape vient de nommer Mgr Kasper en Allemagne. Il était secrétaire du Synode en 1985, présidé par le cardinal Danneels de Bruxelles. Kasper était le chef, l’homme à penser du Synode. Il est très intelligent et c’est l’un des plus dangereux. Le pape vient de le nommer évêque. Il est un peu comme l’évêque de Trèves qui est président de l’Assemblée épiscopale allemande (1) et qui est très dangereux aussi. Ce sont tout à fait des gens de gauche qui, au fond, rejoignent les Rahner, les Hans Küng, mais qui se gardent bien de le dire. Ils prennent des formes pour éviter qu’on les associe à eux, mais ils ont le même esprit. »
 Fideliter N° 70, juillet-août 1989, pp. 12-13.


(1) Karl Lehmann, évêque de Mayence (Allemagne) depuis le 21 juin 1983 et devenu ensuite cardinal le 21 février 2001

lundi 6 octobre 2014

Mgr Lefebvre : Le règne social du Christ invite non à un repli entre soi mais à une implication de chacun dans la société

Octobre conduit à réfléchir sur la grande fête du Christ-Roi qui est célébrée à la fin du mois. Le règne social de Notre Seigneur Jésus Christ n’est pas uniquement un slogan qui nous différencierait des milieux libéraux, lesquels aspirent à une sécularisation généralisée. C’est également une vérité de tous les jours à vivre. Mgr Lefebvre affirmait que les catholiques fidèles avaient peut-être une déficience et une incompréhension de leur devoir en désertant les emplois de responsabilité. A l’heure où les législations les plus dégradantes sont adoptées, ces enseignements sur la royauté du Christ sont utiles. Mgr Lefebvre les prononçait le 30 octobre 1988. Ils reprennent en grande partie son appel du jubilé de la Porte de Versailles.

« On est stupéfait de voir des pays catholiques – disons comme le Valais – comme tous les pays catholiques de la Suisse, comme la France, comme l'Italie, comme l'Espagne, comme l'Irlande, comme tous ces pays catholiques qui sont à 80%, 85% catholiques, qui sont dirigés par des francs-maçons, qui sont dirigés par des ennemis de l'Eglise. Comment est-ce possible ? Comment ces gens-là ont-ils pu arriver à dominer des pays à grande majorité catholique, des gens qui ne sont pas chrétiens, des gens qui veulent détruire la famille chrétienne ; qui introduisent des lois qui démolissent l'enseignement chrétien, qui démolissent les écoles chrétiennes, qui introduisent toutes ces initiatives abominables que nous voyons, comme ces discothèques qui se multiplient partout maintenant dans tous les villages, [ces gens] qui introduisent par conséquent dans la législation, l’avortement, la contraception, qui supportent la drogue, qui ne poursuivent pas la pornographie et qui acceptent ces films abominables contre Notre Seigneur Jésus-Christ : Voilà des petits groupes de gens qui sont contre Notre Seigneur Jésus-Christ et qui dominent des nations chrétiennes. Est-ce possible ? Comment expliquer cela, comment expliquer que dans un pays à 80%, 85% de catholiques, ce soient des gens contre l'Eglise catholique, qui sont contre Notre Seigneur, qui dominent et dirigent tout le monde ?

« Je pense que c'est parce que les catholiques s'imaginent qu’ils ne doivent pas entrer dans les fonctions publiques. Ils ont peur de s'immiscer dans les fonctions publiques. Sans doute ont-ils raison dans la mesure où ils devraient participer à des choses qui sont mauvaises. Mais s'ils le font au contraire pour empêcher les choses mauvaises de se réaliser, ils doivent se manifester ; ils doivent prendre des responsabilités pour le bien des âmes, pour faire régner Notre Seigneur Jésus-Christ dans la législation. Il me semble qu'il y a là une déficience et peut-être une incompréhension du devoir des catholiques fidèles. Il faudrait que dans des villages à 80% catholiques encore et qui ont encore des convictions à 90%, ce soient de bons catholiques qui dirigent le village, qui prennent des responsabilités communales. C’est la même chose dans les États. Il ne faut pas avoir peur de prendre des responsabilités. Ce n'est pas là faire de la mauvaise politique, ce n'est pas faire de la politique de parti, c'est tout simplement chercher le règne de Notre Seigneur Jésus-Christ, le règne social de Notre Seigneur. »

mardi 30 septembre 2014

Mgr Lefebvre : « La vie apostolique n’est pas un pur combat contre les erreurs »

Le Père Eugène de Villeurbanne avait prévenu au début des années 1980 qu’il ne fallait pas « se confiner dans un traditionalisme de combat », cette forme de militantisme sec appliquée au monde religieux. L’abbé Coache l’avait bien perçu, lui qui avait recueilli ces lignes au sein de sa revue intitulée Le combat de la foi. Ce faisant, il ne faisait que reprendre les mises en garde que Mgr Lefebvre adressait à ses séminaristes d’Écône. Certainement, faut-il envisager un combat contre le péché et contre l’erreur. Mais le défaut de vertu des uns ne doit pas pour autant légitimer les excès des autres. Une vie apostolique qui aurait comme principal idéal d’être des « antis », qui se réduirait à une lutte contre les erreurs, ou même qui aurait comme premier objectif la lutte contre les erreurs maintiendra ses auteurs dans les ténèbres. L’invitation que lance le fondateur de la FSSPX en 1975 ne consiste pas à baisser les bras mais avant toute chose à se sanctifier en faisant rayonner la charité :

« Alors il ne faut pas non plus envisager ce combat, cette vie apostolique que vous aurez à mener, il ne faut pas la considérer uniquement comme un pur combat contre les erreurs, contre les difficultés, contre ce qui empêche l'Église de s'étendre. Bien sûr qu'il faut aussi combattre les erreurs, mais il ne faut pas être en premier lieu contre-réformiste, ne pas être d’abord dans la contre-réforme, la contre-révolution, l'anti-libéralisme, l'anti-communisme, n’en pas faire, je dirais, l'objectif premier et principal de votre action. Et on ne peut pas combattre contre les ténèbres sans y mettre d'abord la lumière. Vous aurez beau essayer, si vous ne venez pas avec la lumière, si vous êtes dans les ténèbres et que vous essayez de chasser les ténèbres, vous pouvez toujours y aller, elles ne s'en iront pas. [...] Il faut venir avec la lumière. Comment aurez-vous la lumière ? Eh bien, par la grâce du Bon Dieu, la grâce qui vous illuminera, qui vous éclairera, qui vous fortifiera et qui sera manifeste aussi aux yeux des autres. Il faut que vous manifestiez cela.


« Il est très difficile de convertir les autres si on apparaît déjà soi-même comme quelqu'un qui est faible dans la vie courante, dans la vie pratique. Ce n'est pas, par exemple, en insultant son interlocuteur, en le méprisant, en le traitant de tous les noms qu'on arrivera à le convaincre. Au contraire s'il s'aperçoit vraiment d'une vraie charité envers lui, sincère, surnaturelle, désintéressée, alors il commencera à être accroché parce qu'il aura cette impression très nette : celui qui me parle ne parle pas pour le plaisir d'avoir le dessus et de me convaincre, mais vraiment il veut me faire passer une vérité qui n'est pas à lui et il ne méprise pas ma manière d'être. Et c'est très important cela. Les saints ont converti bien plus par leur exemple, par leur prière, par leur mortification encore que par leurs paroles. Bien sûr la parole est nécessaire, la discussion est nécessaire, il faut convaincre, il faut prêcher évidemment, ils ont converti par la prédication. Mais s'ils ont converti par la prédication c'était précisément parce qu'ils étaient des saints. Les gens ont besoin de cette sainteté. Or ceci est une chose que nous devons retenir constamment et avoir constamment devant les yeux. »

mardi 23 septembre 2014

Il y a 35 ans : Le jubilé de la Porte de Versailles

Il y a trente-cinq ans, le 23 septembre 1979, des milliers de personnes se retrouvaient à Paris, au Palais des Expositions de la porte de Versailles, autour de Mgr Marcel Lefebvre qui célébrait ce jour-là ses cinquante ans de sacerdoce. Il avait en effet été ordonné en 1929 en la chapelle de la rue Royale à Lille par Mgr Achille Liénart, évêque de la ville. A cette occasion, le fondateur de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X prononça un de ses sermons les plus mémorables, lequel se termine par le lancement d'une croisade, celle des prêtres et des pères de famille, ainsi que par son testament spirituel : « Gardez la messe de toujours ! »


1e partie



2e partie 

jeudi 11 septembre 2014

Père Eugène de Villeurbanne : « Le danger est grand de se confiner dans un traditionalisme de combat »

En 1972, le Père Eugène de Villeurbanne fondait le couvent des capucins de Morgon (Rhône) pour maintenir toute la pureté de la règle franciscaine malmenée par les épreuves de la période conciliaire. Très proche de Mgr Lefebvre, il lui demanda de former et d’ordonner ses futurs prêtres. C’est ainsi que l’archevêque conféra le sacerdoce à quatre d’entre eux entre 1982 et 1986, après les avoir formés à Écône. Adonné à la prière, éloigné du monde, faisant rayonner la charité, le Père Eugène eut le souci, jusqu’à sa mort survenue en 1990, de perpétuer l’esprit du Poverello d’Assise, au cours de la sèche période de l’aggiornamento où certains clercs, rongés par l’activisme et par le mépris de toute tradition, avaient fait du domaine religieux un champ d'action politique et voyaient dans leur prochain un ennemi extrémiste à mépriser et à combattre. En 1982, le Père Eugène se rendait compte que le même danger pouvait un jour s’emparer des rangs de ceux qui avaient pourtant eu le courage de défendre la messe et le catéchisme traditionnels. Grand était le risque de voir au sein du monde catholique une guerre partisane de tranchées où le principal ennemi n’était plus le vieil homme qui sommeille en nous mais le voisin de chapelle qui ne fait pas exactement comme nous. Il mettait en garde contre le péril qui consistait à « se confiner dans un traditionalisme de combat ».

« De tous côtés s’installe la division, se manifestent les colères, de l’orgueil, de l’injustice. Des « traditionalistes » un temps d’accord sur les vérités claires et essentielles de la foi mettent leur honneur à soulever des « problèmes », à raison avoir sur des questions d’importance lointaine pour la vie quotidienne des fidèles. Les intelligences s’estiment traditionalistes mais les cœurs ne le sont plus si jamais ils l’ont été. La charité fraternelle est, elle aussi, une richesse de la Tradition.

« Le danger est grand de se confiner dans un traditionalisme de combat, de concevoir les vérités de la foi comme une occasion de lutte, de coups et de victoire, de considérer la théologie dogmatique comme un arsenal de guerre ou même trop exclusivement comme le moyen de l’illumination de l’intelligence dans l’oubli des yeux du cœur assoiffé d’espérance, avide de goûter les trésors de gloire que renferme l’héritage de Jésus-Christ. Grand est le risque d’accommoder les vérités de Jésus-Christ et les membres de Jésus-Christ à ses propres goûts ; saint Paul nous a appris où cela pouvait conduire.
 
« La présence des fidèles à notre messe traditionnelle n’est pas une finalité, la foi aux vérités dogmatiques ne l’est pas non plus ; ce qui compte c’est la foi qui opère par la charité et conduit à la charité pour Dieu et à la charité fraternelle. Les institutions chrétiennes, la catéchèse, la théologie ne doivent pas seulement conduire les âmes aux portes d’entrée de l’amour surnaturel ; elles doivent faire progresser dans le domaine illimité des ascensions dans les profondeurs et les altitudes de l’amour de Dieu, dans le dulcor charitatis. Nul ne saurait s’y enfoncer s’il est en désaccord avec ses frères. « Celui qui n’aime pas son frère qu’il voit ne saurait aimer Dieu qu’il ne voit pas ». Entendons saint Paul nous dire « Du moment qu’il y a parmi vous jalousie et discorde, n’êtes-vous pas charnels et votre conduite n’est-elle pas tout humaine ». Un « traditionalisme » qui a perdu la charité est-il encore traditionnel ? »

Cité par le Combat de la Foi
et par Lecture et Tradition, N° 98,
novembre-décembre 1982, pp. 7-8.


samedi 19 avril 2014

Mgr Lefebvre : Vers la Résurrection, par la Croix

« Alors nous, qui ne sommes pas encore arrivés à la résurrection, notre chemin ici-bas, c’est la croix. Et quelle espérance, quelle profonde joie de nous unir à Notre Seigneur Jésus-Christ pendant notre vie ! Dans les difficultés, dans les épreuves, dans les joies, toujours avec Notre Seigneur Jésus-Christ et avec la Très Sainte Vierge Marie, suivre ce chemin de la croix, nous offrir avec Notre Seigneur Jésus-Christ.

« Et Dieu sait si aujourd’hui d’une manière particulière, nous avons à souffrir moralement de la situation de l’Eglise, par exemple. Cette situation douloureuse de l’Eglise, c’est une souffrance pour nous, de tous les jours. Nous aussi, nous avons à porter notre croix avec Notre Seigneur Jésus-Christ qui la porte en voyant son Eglise. Il n’est pas possible que Notre Seigneur, que la Très Sainte Vierge Marie, voyant ce qui se passe aujourd’hui sur terre pour l’Eglise, cette passion que subit l’Eglise, ne soient pas dans la douleur !

« Alors nous aussi, nous souffrons. Nous souffrons avec Notre Seigneur Jésus-Christ, nous portons notre croix. Et pour cela nous avons toujours besoin d’avoir Notre Seigneur Jésus-Christ devant nos yeux : Jésus-Christ crucifié. Et c’est bien pour cela qu’Il est sur nos autels. Et c’est bien pour cela que Jésus-Christ nous a laissé le sacrifice de la messe, qui n’est autre que le sacrifice de la croix, et qu’Il nous a commandé de participer à la Victime en communiant, c’est la Victime toute sanglante de Notre-Seigneur sur la croix que nous mangeons, et à laquelle nous participons, pour porter la croix tous les jours. Oh ! non pas dans l’amertume, non pas dans le découragement, non pas dans le désespoir. Au contraire ! Mais avec l’espoir qu’avec Notre Seigneur sur la croix, nous serons un jour avec Notre Seigneur dans sa résurrection et dans sa gloire. »

Mgr Marcel Lefebvre, Retraite à Riddes en 1980

lundi 7 avril 2014

Mgr Lefebvre délégué apostolique

Ce film a été tourné dans les années 1950 à l'occasion d'une visite que Mgr Marcel Lefebvre, alors délégué apostolique pour toute l'Afrique francophone, fit à Libreville (Gabon). On le voit portant la cappa magna et bénissant les fidèles au stade René Lefebvre (du nom se son frère missionnaire spiritain) à l'occasion d'une messe célébrée par l'évêque du lieu, Mgr Jean Jérôme Adam, son confrère, sacré la même année que lui.


samedi 29 mars 2014

Mgr Lefebvre : mise au point sur le pape et sur la nouvelle messe

Lors de l’audience que Paul VI lui avait accordée le 11 septembre 1976, Mgr Lefebvre avait été stupéfait de constater à quel point il pouvait être calomnié auprès du pape, lequel affirmait qu’à Écône on faisait prêter un serment contre le Souverain Pontife. Le fondateur de la Fraternité se rendait compte que ses positions pouvaient être caricaturées auprès des autorités de l’Église par ceux qui, tant à l’extérieur des milieux traditionalistes qu’à l’intérieur, souhaitaient ajouter de la défiance à la méfiance afin d’hypothéquer à jamais une résolution de la crise. Les problèmes du Concile et de l’Après-Concile sont suffisamment sérieux pour qu’il n’y ait nul besoin d’ajouter des différends supplémentaires, comme la non-reconnaissance de la tête de l’Église ou l’invalidité du nouveau rite. C’est ce que Mgr Lefebvre déclara solennellement au pape Jean-Paul II le 8 mars 1980 :

Séminaire International Saint Pie X,
8 mars 1980

Très Saint Père,

Afin de mettre fin à des doutes qui se répandent actuellement soit à Rome, soit dans certains milieux traditionalistes d’Europe et même d’Amérique concernant mon attitude et ma pensée vis-à-vis du Pape, du Concile et de la Messe du Novus Ordo et, craignant que ces doutes ne parviennent jusqu’à Votre Sainteté, je me permets d’affirmer à nouveau ce que j’ai toujours exprimé :

1) Que je n’ai aucune hésitation sur la légitimité et la validité de Votre élection et qu’en conséquence je ne puis tolérer que l’on n’adresse pas à Dieu les prières prescrites par la Sainte Église pour Votre Sainteté. J’ai dû déjà sévir et continue de le faire vis-à-vis de quelques séminaristes et quelques prêtres qui se sont laissés influencer par quelques ecclésiastiques étrangers à la Fraternité.

2) Que je suis pleinement d’accord avec le jugement que Votre Sainteté a porté sur le Concile Vatican II, le 6 novembre 1978 à la réunion du Sacré Collège : « que le Concile doit être compris à la lumière de toute la Sainte Tradition et sur la base du magistère constant de la Sainte Église ».

3) Quant à la Messe du Novus Ordo, malgré toutes les réserves qu’on doit faire à son égard, je n’ai jamais affirmé qu’elle est de soi invalide ou hérétique.

Je rendrais grâce à Dieu et à Votre Sainteté si ces claires déclarations pouvaient hâter le libre usage de la Liturgie traditionnelle et la reconnaissance par l’Église de la Fraternité sacerdotale Saint Pie X ainsi que de tous ceux qui, souscrivant à ces déclarations, se sont efforcés de sauver l’Eglise en perpétuant sa Tradition.

Que Votre Sainteté daigne agréer mes sentiments de profond et filial respect en Jésus et Marie.

Marcel Lefebvre
ancien archevêque de Tulle

Sur ce que Mgr Lefebvre entendait par « comprendre le Concile à lumière de la Sainte Tradition », nous reportons le lecteur à cette explication qu’il donnait lui-même dans un entretien accordé à Pacte en 1987 :


« Que signifie « accepter le Concile selon la Tradition ? » Nous en avons parlé plusieurs fois, précisément avec le cardinal Ratzinger. Pour lui, cela veut dire que les thèses de Vatican II devraient être intégrées dans celles de la Tradition. Mais, intégrer, est un verbe encore vague. A mon avis, il convient de distinguer. Il y a quelques textes conciliaires, évidemment, conformes à la Tradition, qui ne posent aucun problème : je pense à Lumen Gentium, mais aussi à d’autres documents, tel celui sur la formation sacerdotale et sur les séminaires. Il y a ensuite des textes ambigus, qui peuvent cependant d’une certaine manière être correctement « interprétés » selon le Magistère précédent. Mais il y a aussi des textes franchement en contradiction avec la Tradition et qu’il n’est possible en aucune manière d’« intégrer » : la déclaration sur la liberté religieuse, le décret sur l'oecuménisme, celui sur la liturgie. Ici, l’accord devient impossible… »

mardi 25 mars 2014

Il y a 23 ans s'éteignait Mgr Marcel Lefebvre

« Je ne suis qu’un évêque de l’Église catholique qui continue à transmettre, à transmettre la doctrine. Tradidi quod et accepi. C’est ce que je pense que je souhaiterais qu’on mette sur ma tombe, et cela ne tardera sans doute pas qu’on mette sur ma tombe Tradidi quod et accepi – ce que dit saint Paul – « Je vous ai transmis ce que j’ai reçu », tout simplement. Je suis le facteur qui porte une lettre. Ce n’est pas moi qui l’ai faite cette lettre, ce message, cette parole de Dieu, c’est Dieu Lui-même, c’est Notre Seigneur Jésus Christ Lui-même, et nous vous avons transmis, par l’intermédiaire de ces chers prêtres qui sont ici présents, et par tous ceux qui, eux-mêmes, ont cru devoir résister à cette vague d’apostasie dans l’Église, en gardant la Foi de toujours et en la transmettant aux fidèles. Nous ne sommes que des porteurs de cette nouvelle, de cet évangile que Notre Seigneur Jésus Christ nous a donné et des moyens pour nous sanctifier : la Sainte Messe, la vraie Sainte Messe, les vrais sacrements, qui donnent vraiment la vie spirituelle. »

Mgr Marcel Lefebvre, sermon des sacres, Écône, 30 juin 1988

Film des funérailles de Mgr Lefebvre, le 2 avril 1991




mardi 18 mars 2014

Visite de Mgr Lefebvre au Gabon

Quelques mois avant sa mort, au mois de juin 1990, Mgr Marcel Lefebvre se rendit au Gabon sur ces terres qu'il avait jadis évangélisées de 1932 à 1945. C'était en quelque sorte ses adieux à l'Afrique qu'il avait tant servie et aimée. Après y avoir installé la Fraternité Saint-Pie X en 1986, il se rendit une dernière fois auprès des prêtres en place, les abbés Patrick Groche et Guillaume de Tanoüarn.



vendredi 14 mars 2014

Mgr Lefebvre : Doit-on aller à Rome ?

« Pour ma part, il m’a toujours semblé, en nous appuyant sur la sainte et fidèle Tradition de l’Église, que c’était mon devoir d’aller à Rome, de protester et de tout faire pour que le retour à la Tradition arrive un jour. Alors quelquefois certains membres de la Fraternité, hélas, ont estimé qu’il ne fallait plus aller à Rome, qu’il ne fallait plus avoir de contacts avec ceux, qui actuellement se dirigent vers l’erreur, qu’il fallait abandonner tous ceux qui ont adopté le concile Vatican II et ses conséquences, et par conséquent, puisque la Fraternité continuait à avoir des contacts avec Rome et avec le Pape, ils ont préféré quitter la Fraternité.

« Eh bien mes chers frères ça n’a jamais été ce que la Fraternité a fait, ni jamais l’exemple que j’ai cru devoir donner. Au contraire, je ne cesse d’aller à Rome, je continue d’aller à Rome et je continue d’avoir des contacts avec le cardinal Ratzinger, que vous connaissez bien, dans le but de faire revenir Rome à la Tradition.

« Si je considérais qu’il n’y a plus de pape, pourquoi aller à Rome ? Mais alors comment espérer faire revenir l’Église à sa sainte Tradition ?

« Car c’est le pape qui doit faire revenir l’Église à la Tradition, c’est lui qui a la responsabilité et si aujourd’hui hélas il se laisse entraîner dans ces erreurs de Vatican II, ce n’est pas une raison pour l’abandonner, bien au contraire ! Il faut faire tous nos efforts pour le faire réfléchir sur la gravité de la situation, le faire revenir à la Tradition et lui demander de faire revenir l’Église dans le chemin qu’elle a poursuivi pendant vingt siècles.

« Certains me diront sans doute, ceux qui nous quittent de cette manière : « C’est inutile, vous perdez votre temps ». C’est qu’ils n’ont pas confiance en Dieu ; Dieu peut tout. Humainement parlant c’est vrai, c’est décevant, mais le Bon Dieu peut tout et la prière peut tout obtenir. Et c’est pourquoi nous devons doublement prier pour le pape, pour que le bon Dieu l’éclaire, pour qu’il ouvre enfin les yeux, pour qu’il voit les désastres qui se répandent dans l’Église, pour qu’enfin les séminaires se remplissent à l’image des nôtres pour de nouveau faire des prêtres qui célèbrent la véritable messe et chantent la gloire du bon Dieu comme Notre Seigneur l’a fait sur la croix, et continuent le sacrifice de la croix. Voilà pourquoi je vais à Rome, voilà ce qu’est la Fraternité mes chers amis. »

Mgr Lefebvre, Zaitzkofen, sermon du 26 février 1983

lundi 3 mars 2014

Mgr Lefebvre et le cardinal Mermillod face aux dissensions françaises

Il n’y a pas loin de quarante ans, Mgr Marcel Lefebvre était le témoin du meilleur comme du pire de la part des fidèles de France. Sans doute sa patrie constituait-elle ce riche terreau qui a permis l’éclosion de nombreuses vocations, où des chapelles de fortune sont devenues des églises affermies, bastions de la catholicité. En même temps, elle était le théâtre de disputes stériles, où les parties, sombrant dans un volontarisme activiste, s’excommuniaient mutuellement. Le 18 septembre 1977, à l’occasion de ses trente ans d’épiscopat, il prêchait en ces termes :

« Vous entendez dire à droite, à gauche : le séminaire a pris une nouvelle orientation; le séminaire a ceci; le séminaire a cela. C’est le diable qui dit cela ! Parce qu'il veut détruire le séminaire. Évidemment, il ne peut pas supporter des prêtres catholiques; il ne peut pas supporter des prêtres qui ont la foi. Et hélas, il faut bien le dire, autour de nous et dans tous les pays, mais particulièrement en France, il y a de telles divisions parmi ceux qui veulent garder la foi catholique que fusent alors les calomnies, les médisances, les paroles exagérées, des réflexions insensées qui ne sont pas justifiées. Ne nous occupons pas de tout cela. Laissons parler. Agissons selon la volonté du Bon Dieu, selon la volonté de l'Église catholique, en continuant ce que nos prédécesseurs ont fait, ce que nos ancêtres ont fait, ce que le concile de Trente a demandé aux évêques et ce qu’ils ont fait : la formation qui a toujours été donnée aux prêtres et nous serons dans la sécurité d’être dans la vérité. C’est tout. Pas besoin d'écouter ce qui se dit de droite et de gauche. Demeurons dans la sécurité ; demeurons dans la foi. »
 
On s’en aperçoit, cette réalité ne date pas du XXIe siècle, ni même du XXe siècle. Cent ans plus tôt, le futur cardinal suisse Gaspard Mermillod avait déjà été frappé par cette propension qu’ont les Français à développer les chicanes. Le 9 mars 1852, il écrivait :

« Il y a le Paris catholique intellectuel, mais les chefs de ce mouvement sont divisés ; ils sont fractionnés en cercles, les cercles en coteries ; c’est le plus triste éparpillement de forces qu’il soit donné à l’homme de voir. Puis, au lieu de chercher à s’unir en face de l’ennemi, ces coteries dépensent leur temps à s’excommunier, leur poudre à se faire feu dessus. L’anarchie est complète, et nulle main, nulle raison assez forte pour rallier toutes ces puissances qui s’individualisent et s’affaiblissent. Il y a bien à la rigueur in necessariis unitas ; il y a trop in dubiis libertas ; il n’y a pas toujours in omnibus caritas ».


lundi 24 février 2014

Mgr Lefebvre : toujours dénoncer l’erreur ?

Faut-il en toute occasion et en tout temps dénoncer les erreurs de ceux qui nous entourent ? L’état assez dramatique de l’Église, les craintes légitimes qui nous habitent pourraient nous y inviter. Telle n’est pas la réponse du fondateur de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. En 1975, dans une conférence aux séminaristes d’Écône, Mgr Marcel Lefebvre rappelle assez justement que la mission principale de l’Église réside dans l’enseignement de la foi et des vérités révélées par Dieu. Se sanctifier, méditer, réfléchir, exercer la charité doit être l’essentiel. Cela ne dispense pas, bien au contraire, de dénoncer ensuite les écueils des erreurs qui nous environnent. Cela doit même découler de la prédication de la vérité évangélique. Mais sous prétexte que les papes depuis Jean XXIII ont supprimé les condamnations, et de fait le système immunitaire de l’Église, faudrait-il passer son temps à condamner et à dénoncer, quitte à se substituer au Saint-Office ? Le défaut ne justifie pas l’excès :

« Si personnellement j'ai cru nécessaire dans les conférences que j'ai déjà pu faire l'année dernière, en particulier sur le libéralisme, vous mettre en garde contre cette erreur et demander qu'on multiplie les livres sur le libéralisme des catholiques, je pense que ces choses sont nécessaires. Non pas que nous devions avoir comme premier but de lutter contre les erreurs, notre premier but c'est de connaître la vérité, évidemment. Et je pense qu'il est important d'insister un peu sur cet aspect. Vous êtes ici au séminaire précisément pour connaître la vérité, pour connaître, dans vos études, la révélation, ce que le magistère de l'Eglise vous enseigne et également ce que l'Eglise enseigne comme principes philosophiques, non seulement comme principes théologiques mais aussi comme principes philosophiques. Et c'est cela qui est essentiel. C'est donc ce qui doit faire l'objet de vos préoccupations, l'objet de vos études d'une manière essentielle : l'étude, la prière, tout ce qui peut contribuer à votre sanctification, la méditation, le silence, la réflexion et l'exercice de la charité entre vous.


« Alors ne faites pas de ce qui est secondaire, qui est un aspect négatif de votre formation, n'en faites pas l'aspect principal. Par conséquent dans vos conversations aussi, dans les discussions qui peuvent s'élever entre vous ne dramatisez pas les choses. D'autre part, il faut également que vous soyez au courant des erreurs de votre temps, des erreurs modernes pour que vous puissiez plus facilement les combattre plus tard lorsque vous aurez à prêcher l'Evangile. Car prêcher l'Evangile, prêcher la sainteté, prêcher les vertus chrétiennes, c'est aussi prêcher l'éloignement du péché, on ne peut pas faire l'un sans l'autre, l'éloignement du vice. Quand vous prêcherez la vérité vous serez bien obligés aussi de prêcher le danger des erreurs, pour protéger la vérité. Car Dieu sait si le démon se charge de toute manière de nous attirer au vice et de nous attirer à l'erreur. Alors n'ayez pas d'une part cette obsession de l'erreur au point que vous en oubliez presque d'affirmer la vérité, de la rechercher, de la connaître d'une façon parfaite. Et d'autre part non plus cette espèce de répulsion à entendre parler des erreurs. Qu'on ne vous parle pas toujours de cela, qu'on ne vous mette pas toujours ce libéralisme devant l'esprit et devant la pensée. »

dimanche 16 février 2014

Mgr Lefebvre : Évitons les discussions stériles !

Le supérieur de la Fraternité trahit. Le supérieur abandonne le bon combat. Le supérieur livre la Fraternité : Ce sont autant de slogans que Mgr Marcel Lefebvre a subis, lui aussi, en son temps. Une petite minorité de ses prêtres prit prétexte des relations avec Rome, brandit ici ou là un texte pour dénoncer une prétendue compromission et l’affaire était faite. Il fallait à tout prix livrer Monseigneur à la vindicte. Hier c’était par le moyen de tracts et de bulletins. Aujourd’hui, ce sont les blogs et les forums qui assurent la triste besogne. Pour le fondateur, ces esprits emportés ne font que manifester leur ingratitude. Avant de montrer que les pourparlers avec Rome n’ont d’autre but que de toucher toujours davantage les âmes, de gagner toujours plus de pâturages, l’archevêque indique que la solution à ce genre de crise se trouve dans la paix du devoir accompli. Loin des discussions stériles, la construction de l’Église se fonde sur la messe, sur le catéchisme, sur les sacrements « tout simplement » :

« Il faut prendre garde dans la confusion actuelle, provoquée par l’absence de doctrine, par la disparition de la foi, devant les divisions qui surgissent partout et qui sont l’œuvre du diable, évitons les discussions stériles ! Dieu sait s’il y en a des discussions stériles parmi les traditionalistes ! Mon Dieu, cela continue, cela ne fait que s’amplifier !

« Peut-être certains d’entre vous ont-ils déjà entendu dire que des petits pamphlets circulent contre moi-même, contre ma lettre N° 16, contre mes contacts avec le pape et avec Rome. Personnellement cela ne me touche pas beaucoup. C’est malheureux lorsque cela provient de bons amis, des amis sur lesquels on croyait pouvoir compter et qui, ma foi, disent exactement la même chose que les pires des progressistes parce que je me fais traiter de « traître » par ces bons amis, parce que, soi-disant, je suis en train de faire des compromissions, je suis en train d’abandonner la messe ancienne, je suis en train de livrer les traditionalistes à Satan, etc.

« Quand je suis arrivé au Chili, dans les journaux, il y avait des articles disant : « Le Cardinal Silva Henriques dit que Mgr Lefebvre est un traître et un Judas » ! Voilà d’un côté, le pire des progressistes, le cardinal Silva Henriques du Chili, qui était ami d’Allende, et de l’autre, ceux qui se disent les ennemis des progressistes, qui disent aussi que je suis un traître ! Il faut croire qu’ils se rapprochent entre eux et qu’en définitive ils sont plus près qu’ils ne croient les uns des autres.

« Qu’importe ! Si cela peut ajouter quelque chose au peu de mérites que j’ai, tant mieux ! On m’a dit que j’étais Pilate. Je crois que je ne vous ai pas encore livrés, mais je crois plutôt que ceux-là ressemblent aux soldats qui crachaient sur le visage de Notre Seigneur. Je pense qu’ils ressemblent davantage à cela parce que j’estime qu’il est vraiment ignoble de dire que je préfère, paraît-il, éviter le scandale que de défendre la vérité. Vous êtes juges ! Voilà des choses qui se disent maintenant, mais tout cela, ce sont des discussions stériles. Laissons à ceux qui disent cela, qui diffusent des choses de ce genre-là, dont certains ont même été élevés dans cette maison, la responsabilité de ce qu’ils disent. Peu importe ! A la grâce de Dieu ! Je ne veux pas entrer dans ces discussions. »

« Ce qui est essentiel dans notre travail, c’est de continuer la Tradition de l’Église, tout simplement, de travailler à la construction de l’Église par le catéchisme, par les sacrements, par la prédication, tout simplement… Et si nous pouvons, par nos prières et par nos efforts, arriver à faire en sorte qu’au lieu d’être seulement quelques milliers de traditionalistes fidèles à la Tradition, si nous pouvions arriver, en brisant le rideau de fer qui est autour de nous et qui nous enserre, à faire en sorte qu’il y ait des millions et des millions d’âmes et peut-être des centaines, des milliers de prêtres qui redisent et qui participent au Sacrifice de la Messe selon la Tradition, la Messe de toujours, je crois que nous sommes obligés en conscience de faire tout ce que nous pouvons pour y arriver.

« Si nous n’y arrivons pas, nous n’y arrivons pas ! Nous aurons fait au moins tout ce que nous pouvions. C’est le seul but que j’ai par toutes ces démarches que je peux faire auprès de Rome. Je n’ai pas d’autre but que de dire : si seulement je pouvais briser ce rideau de fer qui nous enserre et faire en sorte que des millions d’âmes se sauvent parce qu’elles auront de nouveau la source de la grâce dans la vraie Messe, dans les vrais sacrements, dans le vrai catéchisme, dans la vraie Bible, eh bien, je pense que nous n’aurons pas perdu notre temps. Alors je vous demande de prier pour cela. »

(Mgr Marcel Lefebvre, conférence à Écône, 3 mai 1979)

samedi 8 février 2014

Mgr Lefebvre : Au lieu de critiquer ou blâmer, soutenons les prêtres !

Dans un précédent article, nous avions montré à quel point Mgr Lefebvre avait le souci des prêtres extérieurs à la Fraternité au point que dans ses statuts, il a pris soin de placer cet apostolat sacerdotal avant même les œuvres des prieurés et des écoles. Un réflexe bien humain pourrait laisser penser qu’en se rapprochant d’autres prêtres, ceux de la Fraternité pourraient se laisser influencer et se faire emporter par les sirènes qui animent le monde actuel. N’est-ce pas ce même argument bien trop humain qu’on aurait pu objecter aux douze apôtres qui se sont séparés, en sortant du Cénacle, pour gagner les quatre coins du monde et s’exposer à toutes sortes de danger ? Eux aussi, transis de peur auraient pu être gagnés par les scrupules d’une fausse présomption et auraient pu rebrousser chemin. Ils ne raisonnaient pas avec des conjectures pusillanimes. Forts dans la foi, animés par l’invincible esprit de la Pentecôte, ils savaient pertinemment que leur force de conviction ne reposait pas sur leur petit être mais sur la personne même de Jésus-Christ. « Ma grâce te suffit, c’est dans la faiblesse que ma puissance donne toute sa mesure » (IIe épitre aux Corinthiens, XII, 9). C’est fort de cette inébranlable confiance en Dieu que Mgr Lefebvre osait prononcer en 1975 cette vibrante conférence missionnaire en faveur des prêtres diocésains :


« Je pense que l’un des premiers buts de la Fraternité sacerdotale c’est la formation de prêtres. Il faudrait que nous puissions avoir un grand séminaire dans tous les pays du monde. Nous n’y sommes pas encore. Et puis non seulement la formation des prêtres mais aussi le soutien spirituel des prêtres qui sont encore dans les diocèses. Beaucoup de prêtres sont désemparés actuellement, absolument désemparés.
On ne peut pas dire que tous les prêtres – sous prétexte qu’ils ne disent pas la messe de toujours – sont de mauvais prêtres. Ce serait exagéré de dire cela. Beaucoup souffrent, ils se rendent compte que la messe qu’ils disent ne leur donne plus le soutien qu’ils avaient autrefois, ils souffrent dans leur vie spirituelle, ils souffrent par l’exemple des prêtres qui autour d’eux abandonnent, qui ne sont plus de vrais prêtres. Tout cela les fait souffrir. Alors au lieu d’être dur avec ces prêtres, de les critiquer et de les blâmer, essayons au contraire de les soutenir, de les amener à être de saints prêtres, de les amener à retrouver ce qui faisait leur joie autrefois, ce qui faisait leur vie sacerdotale, ce qui faisait leur soutien spirituel. Et même, ces prêtres peuvent venir passer chez nous, dans nos maisons, trois jours, quatre jours, cinq jours s’ils le désirent, eh bien invitez-les ! Qu’ils sentent qu’ils retrouvent chez nous vraiment la foi de leur jeunesse, la foi de leur sacerdoce. On sent ce besoin, et je ne serais pas étonné que le jour où nous aurons des maisons répandues comme cela dans divers pays, des prêtres viendront demander s’ils ne peuvent pas demeurer et travailler avec nous parce qu’ils ne se sentent plus le courage de travailler là où ils sont, critiqués par d’autres. Ou bien on essaye de les recycler, ou bien on leur donne des orientations dont ils ne veulent pas. Ils seraient probablement heureux de venir travailler avec nous. »

dimanche 26 janvier 2014

Mgr Lefebvre : Ne soyons pas émus, gardons la paix dans l'épreuve

A la fin de sa vie, Mgr Lefebvre reconnaissait que l’histoire de la Fraternité, c’était l’histoire de ses divisions. La position délicate de l’œuvre au sein de l’Église l’exposait de manière particulière aux dissensions. Ce n’est pas dans une autre situation que se trouvait la Compagnie de Jésus à l’époque où elle a réinsufflé la foi à travers le monde : Tantôt admirée, tantôt proscrite, elle fut également saluée, puis décriée, parfois déchirée.

Dans son histoire, la Fraternité a donc connu des divisions d’un côté comme de l’autre. Elle a vu s’éloigner tour à tour le directeur d’Écône, celui du séminaire américain, un des assistants généraux, un supérieur de La Reja, un ancien curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, un des quatre évêques. Nul n’a été épargné, pas même les plus grands ! Le fondateur qui, un instant, a failli être mis de côté du séminaire qu’il avait fondé, ayant renvoyé à un autre moment tout le personnel de son district américain, ne s’étonnait guère de ces épreuves. D’une certaine manière, ces attaques étaient la preuve que le démon s’acharnait contre une œuvre qui exerçait un bien immense dans les âmes, tout en continuant activement sa mission.

A l’occasion d’un départ groupé de prêtres, Mgr Lefebvre décrivait les écueils auxquels était exposée la Fraternité. Après avoir montré que certains tombaient par usure et découragement, relativisant les erreurs, embrassant la nouvelle messe, il montrait aussi, comme c’est le cas actuellement, que plusieurs trouvaient des prétextes et des calomnies pour justifier un départ se fondant sur un soi-disant abandon de la part des autorités de la FSSPX. Ainsi s’exprimait-il à ses prêtres, le 16 juillet 1989 :

« La deuxième tentation que le diable suscite dans l'esprit de certains de nos prêtres, qui provoquent une déchirure nouvelle dans la Fraternité, peut se résumer en ceci : "Nous avons fait confiance à la Fraternité du début, à ses principes et à son action, toutefois nous constatons que l'esprit de la Fraternité change, c'est par fidélité à la Fraternité initiale que nous quittons la Fraternité actuelle !"

« Pour justifier cette attitude, il faudra donc chercher les indices de changement. Et dès lors, les moindres choses seront exploitées, grossies, jusqu'à devenir de vraies calomnies. Ce fut le cas de [tel abbé] et de [tel abbé], l'accusation se portait jusqu'à moi-même. Il fallait tromper les fidèles pour qu'ils suivent ceux qui nous quittaient. C'est une entreprise vraiment basée sur le mensonge. En fait, ceux qui cherchaient à opposer la Fraternité d'aujourd'hui à celle d'hier étaient "sédévacantistes" et refusaient de prier publiquement pour le pape. […] Il a fallu trouver des motifs à ce départ. Ce fut facile. "Nous sommes les purs, les autres sont les impurs".

« A partir de ce moment c'est vraiment l'esprit diabolique qui s'est emparé de nos confrères pour trouver des manifestations de toutes les tares et de tous les vices. L'un des premiers accusés fut l'abbé [untel], accusé d'être à l'origine de toutes les mutations, et d'avoir tous les défauts étant donné que [tel autre prêtre] et ses amis intimes ont découvert que l'enterrement de son père était un enterrement juif !... [Cet abbé] serait donc juif !... Ils ont découvert aussi que [d'autres abbés] seraient des juifs. Puis ce fut le tour [d'autres abbés encore], atteints d'immoralité. Et même [un directeur] n'est pas exempt, son gouvernement du Séminaire est laxiste et l'immoralité se répand au Séminaire. Enfin le Supérieur général lui-même juge les affaires sommairement et partialement. Je ne me fais pas d'illusion, je serai moi-même, sans tarder, calomnié comme je l'ai été par tous ceux qui ont déchiré la Fraternité.

« Le processus est toujours le même, il faut à tout prix justifier l'acte scandaleux du détournement d'un groupe de prêtres, de séminaristes et de fidèles. Tout en nous efforçant d'éclairer ceux qui nous quittent sur le tort grave qu'ils causent à l'œuvre de la Tradition, ne soyons pas émus, gardons la paix dans l'épreuve. L'histoire de la Fraternité ressemble à celle de l'Eglise et la continue. "Oportet haereses esse" !... La Providence permet ces purifications pour éviter les contaminations. Il s'agit dans ce dernier cas d'une fausse conception de la formation spirituelle, qui a un relent de jansénisme. Que Dieu nous en préserve !

« Nous nous en sommes aperçus bien tard, le mal était accompli auprès de quelques jeunes prêtres et auprès de la moitié des séminaristes [de La Reja]. La prudence exige de nous de n'avoir plus aucune relation avec ceux qui nous quittent, pas même épistolaire, sauf si l'un d'entre eux donne des signes sérieux de regret. Prions pour eux, c'est la vraie charité que nous pouvons exercer à leur égard. Que ces séparations soient l'occasion de faire un examen de conscience, afin de veiller courageusement à ne pas admettre de relâchement doctrinal, moral, spirituel, disciplinaire. "Vigilate et orate". »

jeudi 23 janvier 2014

Prêtres pour demain

Le précédent lien de cette vidéo étant désactivé, nous publions à nouveau ce documentaire réalisé sur le séminaire d'Ecône en 1986. Ce film manifeste l'idéal de la sainteté sacerdotale, premier objectif assigné par le fondateur à sa Fraternité. Comme nous l'indiquions dans la première publication, loin des grandes crises qui secouèrent l'oeuvre, le travail du séminaire s'accomplit dans la prière et le silence.


mercredi 15 janvier 2014

Mgr Marcel Lefebvre : Zèle amer et sainte psychologie

« Nous avons trop facilement un zèle amer, comme le disait d’une manière magnifique dom Marmion aidé de saint Benoît : Le zèle amer est un zèle sincère, généreux, mais qui veut toujours imposer ses idées aux autres, qui ne tolère pas la contradiction et qui veut faire plier les autres à ses propres conceptions à soi, absolument, d’une manière absolue, dans tous les domaines. Il y a le domaine de la foi, évidemment, mais enfin il y a tout de même une manière de parler, il y a une manière de concevoir les choses ! Et puis quel est le vrai zèle ? Si vraiment vous êtes convaincu que vous avez la vérité, le vrai zèle consiste à prendre les moyens pour faire en sorte que votre interlocuteur vienne à la foi, que vous croyez être vraiment la vraie foi. Vous devez donc prendre tous les moyens. Mais est-ce que le moyen le meilleur est de l’envoyer promener, de lui mettre le pied dans le derrière. Mais non, c’est clair. Mais certains font cela ! Ils ne mettent pas le pied dans le derrière mais ils leur crachent à la figure ou presque, ils les insultent ! Mais ce n’est pas cela. Je ne veux pas critiquer un tel ou un autre, je vous demande à tous de prendre cela un peu pour vous, nous en avons toujours besoin, parce que nous avons évidemment cette tendance : Quelqu’un dit le contraire de ce que nous disons : Vous êtes ceci, vous êtes cela, vous êtes un progressiste, vous êtes un intégriste, vous êtes un moderniste ! Évidemment on a tendance à faire cela, mais croyez-vous que c’est le moyen de le convertir ? Mais non. Est-ce que vous allez faire cela avec vos fidèles ? Vos fidèles sont des pécheurs, il y aura des pécheurs publics dans vos paroisses, il y aura des gens qui se conduisent mal. Alors allez-vous prendre un bâton puis aller les frapper et leur dire : Sortez d’ici ! Mais non ! Essayez de les convertir, de prendre les moyens pour les convertir, mais non pas prendre des moyens violents, ne pas avoir ce zèle, cet orgueil, de mépris de la personne, de mépris des gens et puis ce manque de psychologie, ce manque de sainte psychologie. Ce n’est pas comme cela qu’on convertit les gens. On écoute, on essaye de patienter, on voit, on essaie de placer une parole. Les personnes sont confiantes, elles voient qu’on discute calmement, posément, alors on fait confiance, on cause posément. Vous n’êtes pas tous des docteurs en Israël, vous n’êtes pas tous à qui aura les grades les plus élevés et qui sera capable d’excommunier ceux qui ne pensent pas comme lui. Ayez donc un peu de charité ! »


Mgr Marcel Lefebvre, Écône, conférence du 28 juin 1975

mardi 7 janvier 2014

Mgr Lefebvre : La fermeté, sans mépris ni insulte

La crise actuelle contraint à travailler la vertu de patience. Alors même que nous défendons un trésor, celui de la Tradition de l’Église, le risque est grand d’en tirer quelque sentiment d’orgueil, lequel nous entraînera dans des fautes de mépris et dans l’insulte à l’encontre de notre prochain. Recourir à des termes inutilement vexants, illustrer son propos par des comparaisons humiliantes est une pente facile à emprunter, qui permet d’assouvir ses rancœurs. Dans une conférence donnée à ses séminaristes, Mgr Lefebvre démontre que de telles manières de procéder auront inévitablement un résultat inverse de celui qui est escompté. On ne fera que ralentir l’apostolat, en détournant les âmes. Défendre sans compromission la vérité ne nécessite aucunement de hausser le ton ou de recourir à la colère. Sinon, nous démontrons que nous n’avons pas pleinement confiance en Dieu et en sa grâce :

« Nous devons bien prier pour que, du côté des fidèles qui maintiennent la tradition, on se maintienne toujours dans une attitude qui soit forte, une attitude ferme mais non pas une attitude de mépris envers les personnes, d’insultes envers les personnes, d’insultes envers les évêques, non ! Non, nous avons, je dirais – ce n’est pas de notre faute – mais nous avons la supériorité d’avoir la vérité, eh oui, comme l’Église a la supériorité d’avoir la vérité sur l’erreur, elle a cette supériorité. Alors je dirais, par le fait même qu’on se sent dans la vérité, c’est la vérité qui doit faire son chemin, c’est la vérité qui doit convaincre, ce n’est pas notre personne. Ce n’est pas parce qu’on se mettra en colère, ce n’est pas parce qu’on insultera les gens que cela donnera du poids de plus à la vérité. Au contraire ! Cela mettra un doute si nous avons la vérité. Parce que le fait de nous mettre en colère, d’insulter, cela montre que nous ne nous confions pas seulement dans le poids de la vérité qui est le poids de Dieu lui-même. Et c’est en Dieu que nous nous confions, c’est dans la vérité qui est Dieu, qui est Notre-Seigneur Jésus-Christ que nous nous confions. Alors qu’est-ce que nous pouvons avoir de plus sûr que cela ? Rien de plus sûr. Et petit à petit, cette vérité fera son chemin, elle doit le faire. Alors prenons garde dans toutes nos expressions, prenons garde dans toute notre attitude de ne jamais avoir une attitude de mépris et d’insulte des personnes mais de fermeté contre l’erreur : Oui, fermeté absolue, sans compromission, sans relâche, parce que nous sommes avec Notre Seigneur, parce qu’il s’agit de Notre Seigneur Jésus Christ. Au fond c’est tout l’honneur de Notre-Seigneur et je dirais la gloire de la Sainte Trinité qui est en jeu. C’est cela, sa gloire sur terre, non sa gloire infinie, non sa gloire dans le Ciel, mais la gloire de Notre Seigneur ici-bas. C’est la vérité et donc nous la défendons à tout prix, quoi qu’il arrive. »

Mgr Marcel Lefebvre, conférence aux séminaristes, 1976