mercredi 23 octobre 2013

Mgr Lefebvre : l’appartenance à la FSSPX exige la reconnaissance du pape

Certains milieux sédévacantistes, pouvant difficilement faire passer le fondateur de la FSSPX pour l’un des leurs, ont parfois tenté d’expliquer qu’il était toutefois tolérant à l’égard de leurs thèses et que la question qui leur tient à cœur demeurait ouverte dans son entourage. Ainsi, n’hésitèrent-ils pas à solliciter quelques interrogations que l’archevêque s’était faites. Pourtant, son attitude en la matière n’a guère varié. Il ne nous est pas permis, expliquait-il, de statuer sur ce qui relève des prérogatives des autorités de l’Église et nous devons reconnaître le successeur de Pierre, malgré les graves dérives que nous pouvons constater à Rome. Aussi, refusait-il que les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X s’affranchissent de la reconnaissance du pape. C’est en ces termes qu’il s’ouvrait de cette exigence devant les séminaristes d’Écône le 29 janvier 1980 :

« Chers amis, avant de continuer la conférence, je voudrais dire deux mots au sujet de ce que l’on pourrait appeler la situation de la Fraternité. Il y a peut-être eu parmi vous un petit peu d’émotion ces temps-ci au sujet de ceux qui ne veulent pas admettre l’attitude de la Fraternité vis-à-vis du pape et vis-à-vis de la Messe, mais plus particulièrement vis-à-vis du pape. C’est vrai que je suis peiné de voir qu’il y a quelques-uns parmi nos jeunes prêtres qui ne veulent pas garder l’attitude qu’ils ont connue ici. C’est ce que j’ai eu l’occasion de leur dire : je ne comprends pas comment vous pouvez vous séparer comme cela de l’esprit de la Fraternité, étant donné que vous savez parfaitement qu’ici, à Écône, on a toujours prié pour le Saint-Père, on a toujours considéré que le Saint-Père existait, j’en ai montré l’exemple par le fait que j’ai toujours répondu aux appels qui m’ont été faits à Rome. Par conséquent, vous rompez avec la tradition du séminaire, vous rompez avec ce qui a été fait dans la Fraternité, et vous emmenez les fidèles que la Fraternité vous a confiés dans une voie qui n’est plus celle de la Fraternité. Alors s’il y a des difficultés dans votre communauté, elles ne viennent pas de l’attitude que nous avons à Écône, elles viennent de votre attitude qui n’est pas conforme à celle d’Écône et à celle de la Fraternité.


« Il y a donc un manque de fidélité de leur part. Ils le savaient très bien lorsqu’ils ont reçu l’ordination, ils savaient parfaitement quelle était l’orientation de la Fraternité. Alors je dirais que c’est à la fois un manque de fidélité, un manque de loyauté parce qu’enfin, tout de même, ils savent qu’ils ont reçu l’ordination dans la Fraternité, de mes mains, ils m’ont promis obéissance au moment de l’ordination et je pense que, dès avant l’ordination, ils avaient déjà cette idée de ne pas prier pour le pape et de ne pas considérer le pape comme existant. Alors cela n’est vraiment pas permis, devant le Bon Dieu, de dire : nous acceptons l’ordination, mais nous ne suivrons pas les orientations de celui qui nous l’a donnée, du fondateur de la Fraternité. C’est inadmissible, c’est vraiment malheureux, c’est vraiment très pénible de considérer l’attitude de ces quelques prêtres. Heureusement ils sont peu nombreux, ce sont des exceptions, j’aurais souhaité qu’il n’y ait pas d’exception et que tous comprennent bien l’attitude que prend la Fraternité. »

vendredi 11 octobre 2013

Sanctifier les autres prêtres : un des premiers buts de la Fraternité Saint-Pie X

Le premier but de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X est la sanctification de ses prêtres. C’est ce qu’indique Mgr Marcel Lefebvre dans les statuts de l’œuvre. Avant même de parler de la crise de l’Église ou des formes d’apostolat auprès des fidèles ou auprès de la jeunesse, le fondateur aborde le deuxième but. Il s’agit de sanctifier les prêtres non membres de la FSSPX :
« Un deuxième but de la Fraternité est d’aider à la sanctification des prêtres, en leur offrant la possibilité de retraites, récollections. Les maisons de la Fraternité pourraient être le siège d’associations sacerdotales, de tiers-ordres, de périodiques ou revues destinées à la sanctification des prêtres. »
Dans une conférence dispensée le 13 mars 1981 à Écône, Mgr Lefebvre revient plus précisément sur cet aspect profondément apostolique de la Fraternité :


« Il semble qu’autour de la Fraternité veuillent se créer tout doucement des liens d’amitié, des liens étroits entre un certain nombre de prêtres qui tout doucement reviennent à la Tradition et qui pourraient éventuellement même reconstituer des associations sacerdotales unies à la Fraternité. Ce ne serait pas des membres de la Fraternité, mais ils seraient des prêtres faisant partie d’associations sacerdotales, par district par exemple, qui pourraient profiter de la spiritualité de la Fraternité, profiter même de ses retraites, profiter du calme de ses maisons pour des récollections et se retrouver ainsi en union avec la Fraternité.

« Ce n’est pas du tout que nous voulions monopoliser en quelque sorte et vouloir donner l’impression qu’il n’y a que la Fraternité et qu’en dehors de la Fraternité il n’y a rien, au contraire ! Mais c’est dans le but de la Fraternité, vous pouvez le voir dans ses statuts, que la Fraternité doit s’efforcer de soutenir la spiritualité des prêtres, la sanctification sacerdotale, pas seulement dans la Fraternité, mais aussi autour de la Fraternité. Le rayonnement de nos prieurés, le rayonnement de la Fraternité, doit s’étendre particulièrement aux prêtres, parce que ces prêtres sont souvent des prêtres très isolés, très abandonnés, rejetés par leurs évêques et souvent se trouvant vraiment dans des situations pénibles.


« Alors si la Fraternité leur vient en aide, moralement, spirituellement, même éventuellement matériellement, ce sont des choses qui sont tout à fait souhaitables et il semble que, de plus en plus, que ce soit aux Etats-Unis par exemple, que ce soit en Allemagne, même en France, des réunions de prêtres commencent à se faire autour de nos prieurés et ces prêtres sont tout heureux de se sentir en famille, de se sentir soutenus, de ne plus être tout à fait isolés. »

samedi 5 octobre 2013

La Fraternité Saint-Pie X, émanation de « l’Église conciliaire » ?

Certains milieux marginaux de la Tradition, faisant subir quelques contorsions à la pensée de Mgr Lefebvre, avancent aujourd’hui l’idée que « l’Église conciliaire » serait une entité structurelle indépendante et distincte de l’Église catholique fondée par Notre Seigneur. Les conséquences de cette dérive doctrinale sont assez dramatiques. Elles condamnent forcément le fondateur de la Fraternité Saint-Pie X qui a passé son temps à se rendre auprès  des autorités pourtant imbues des idées du Concile, afin de trouver un modus vivendi.

Ces mêmes groupes avancent l’idée que Mgr Lefebvre aurait reçu l’approbation de la véritable Église puisqu’elle aurait été approuvée par Mgr François Charrière, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg le 1er novembre 1970. Et ces mêmes pourfendeurs de « l’Église conciliaire » – terme inventé par Mgr Benelli – n’hésitent pas à faire du brave Mgr Charrière le deuxième père de la Fraternité. Après tout, c’est lui qui a signé l’acte de naissance de la Fraternité : son décret d’érection. Mais était-il bien en phase avec Mgr Lefebvre ?

Les deux hommes s’étaient connus à Dakar lorsque l’évêque de Fribourg était venu pendant une quinzaine de jours visiter les Suisses installés au Sénégal. Ils avaient sympathisé et Mgr Lefebvre avait maintenu les relations. Comme l’université de Fribourg avait plutôt bonne réputation, l’archevêque avait installé son séminaire dans la ville puis avait requis l’autorisation de son ami, Mgr Charrière. Mais ce dernier lui avait, dans un premier temps, conseillé d’envoyer ses futurs prêtres dans le séminaire interdiocésain :

« Alors je suis allé voir Mgr Charrière et je lui ai demandé s’il n’y avait pas quelque chose quand même à Fribourg qui soit mieux que cette maison des Pères du Saint-Esprit, où les quelques séminaristes dont je m’occupais, pourraient trouver place et une certaine formation. Il m’a répondu : « Vous savez, Monseigneur, la situation est très mauvaise actuellement, elle va toujours en empirant ; et je suis très pessimiste sur l’avenir même du diocèse et de la formation sacerdotale. Je suis pessimiste, je ne sais pas comment les choses vont tourner. En tout cas, nous avons, oui, un séminaire interdiocésain qui sert tous les diocèses de Suisse et qui reçoit même des étudiants en civil. Par conséquent, il pourrait bien recevoir vos étudiants aussi. Alors, peut-être, allez voir là. » (1)

Bien étranger au Coetus, Mgr Charrière était en réalité un véritable esprit conciliaire, avant même Vatican II. Lors de son accession au Siège de Fribourg, la Voix ouvrière, quotidien communiste romand, loua la « réputation d’homme de gauche » du nouvel évêque. C’est à cette époque qu’il encouragea le Conseil œcuménique des Églises, pourtant fermement interdit par Rome. Dès 1960, le prélat adressa au Secrétariat pour l’Unité des Chrétiens, dont il était membre actif aux côtés du cardinal Bea, une note sur la liberté de conscience qui allait marquer les esprits et former, aux côtés des écrits de Mgr Émile de Smedt, le terreau de Dignitatis Humanae, texte en faveur duquel il vota naturellement. Par ailleurs, Mgr Charrière était très engagé dans l’œcuménisme. Il n’hésita pas à dialoguer avec les Protestants et, à l’époque où il recevait les demandes de Mgr Lefebvre pour reconnaître son œuvre, il s’envolait en 1970 vers la Moscou soviétique pour représenter Paul VI aux obsèques du patriarche schismatique Alexis Ier, allié au pouvoir de Brejnev, dans un geste d’œcuménisme accompli.


A bien des égards, Mgr François Charrière était un représentant confirmé de ce que Mgr Benelli appela « l’Église conciliaire ». Et c’est pourtant lui qui a érigé l’institut de droit diocésain appelé : « Fraternité sacerdotale Saint-Pie X ». Considérer que cette expression recouvre une entité structurelle distincte de l’Église catholique, c’est malheureusement conclure que la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X est non pas une fondation de l’Église catholique, mais une émanation d’une structure schismatique. Dire que telle n’était pas la pensée du fondateur, c’est enfoncer une porte ouverte.

Côme de Prévigny

(1) Mgr Marcel Lefebvre, Petite histoire de ma longue histoire, 1999.